Le droit à la vie et à la dignité figure parmi les principes fondamentaux accordés à l’enfant dès sa conception selon la loi islamique. Des règles détaillées encadrent la protection de l’enfant à naître, incluant des prescriptions précises sur l’annonce de la naissance, la nomination et la circoncision.La question du moment où l’âme est insufflée soulève des débats parmi les écoles juridiques et influence directement les pratiques entourant la grossesse et l’accueil du nouveau-né. Cette diversité de points de vue structure l’ensemble des rites et des droits garantis à l’enfant dès les premiers instants de son existence.
À quel moment l’âme est-elle attribuée au bébé selon la tradition islamique ?
On touche ici à un sujet qui intrigue et divise. L’attribution de l’âme au bébé, dans la pensée islamique, se situe à la croisée des chemins entre croyance, loi et réflexion éthique. Les textes majeurs, notamment le Coran, se gardent bien de trancher : rien d’expliqué sur le jour, ni l’instant où l’âme rejoint le fœtus. La sunna, quant à elle, ajoute quelques repères mais pérennise le mystère.
Des récits anciens, rapportés notamment par Abu Dawood et relayés par des savants comme ibn Qayyim, décrivent l’intervention d’un ange chargé d’insuffler l’âme. Mais, là encore, les avis bifurquent : certains affirment que cela survient au quarantième jour, d’autres au cent vingtième, et pour quelques opinions minoritaires, autour du cent trente-deuxième jour. Ce flou n’est pas anodin : il influence tout un pan des pratiques liées à la grossesse et à la naissance.
La plupart des écoles sunnites se retrouvent néanmoins sur la référence des 120 jours, s’appuyant sur un hadith fréquemment évoqué : « Après 120 jours, Allah envoie un ange qui insuffle l’âme et inscrit le destin de l’enfant. » À travers cette interprétation, l’entrée dans la vie ne répond pas uniquement aux critères médicaux ; elle inaugure une dimension spirituelle qui marque chaque nouveau-né.
Le rôle attribué aux anges dans ce processus insuffle une solennité particulière à l’événement. Dès cet instant, l’enfant à naître bénéficie d’un nouveau statut qui engage toute la communauté, autant dans la sphère spirituelle que concrète.
Les droits fondamentaux de l’enfant en islam : protection, dignité et éducation
À la naissance, la société et la famille sont tenues d’assurer concrètement la protection de l’enfant. Les parents se voient confier des responsabilités précises inspirées par les textes fondateurs et la jurisprudence. On peut résumer ces engagements fondamentaux ainsi :
- subvenir à ses besoins,
- veiller à sa santé,
- et à sa sécurité.
La négligence, tout comme la maltraitance, sont rejetées sans détour. La dignité de l’enfant se transforme donc en droits tangibles, reconnus et défendus au cœur même de la tradition.
Parmi ces droits concrets figurent notamment :
- nom,
- identité,
- respect de la personne.
Le texte coranique est catégorique : il n’y a aucune hiérarchie entre fille et garçon ; chaque enfant naît avec le même honneur et la même valeur humaine. Ce principe irrigue l’ensemble de la jurisprudence musulmane, excluant toute discrimination fondée sur le genre ou l’origine au sein des droits accordés à l’enfant.
L’éducation se trouve également au cœur des exigences parentales. Elle dépasse largement les enseignements religieux ou moraux pour intégrer la transmission des connaissances, du savoir pratique aux découvertes artistiques ou scientifiques. Les parents sont invités à allumer la curiosité de leur enfant, à stimuler son désir d’autonomie, tout en transmettant des repères solides.
Des mécanismes solidaires très concrets appuient ce cadre. La zakat, aumône obligatoire, et la sadaqa, aumône volontaire, ont notamment pour finalité d’aider les familles vulnérables afin que chaque enfant ait accès à un environnement favorable à son épanouissement, sans tenir compte des conditions de départ.
Rituels de la naissance et liberté religieuse de l’enfant : entre spiritualité et respect des choix
L’arrivée d’un bébé déclenche une série de gestes codifiés, chargés de sens. Dès les premiers instants, c’est souvent au père que revient la tâche de prononcer doucement l’appel à la prière (adhan) à l’oreille droite du nouveau-né. Inscrit dans la tradition prophétique, ce geste symbolise l’intégration du bébé dans la communauté musulmane, sans revêtir pour autant un caractère d’appartenance imposée. C’est d’abord un accueil, l’inclusion dans une histoire collective.
Le choix du prénom, lui, revêt un caractère particulier. Les familles optent fréquemment pour des prénoms chargés d’histoire, comme Mohammed, Adam, ou provenant de compagnons renommés du Prophète. En agissant ainsi, il s’agit de transmettre une mémoire, de situer l’enfant dans une filiation, tout en tenant compte de la diversité de chaque culture ou région.
La question de la liberté religieuse de l’enfant hante la pensée musulmane, aussi bien ancienne que contemporaine. Déjà, au temps de la charte de Médine rédigée sous l’égide de Mahomet, le principe du respect de la diversité religieuse était posé. De nos jours, différents courants, sunnites, chiites ou soufis, n’hésitent pas à défendre une pluralité d’opinions sur l’autonomie de l’enfant. Même né dans un cadre religieux, celui-ci reste une personne libre d’avancer selon ses propres choix, à mesure qu’il grandit.
Avec le temps, des symboles comme le croissant, l’étoile ou la main de Fatma sont venus enrichir cet héritage. Ces marques appartiennent davantage au registre culturel qu’au dogme, mais elles montrent à quel point les rites peuvent évoluer, se transmettre ou se réinventer de génération en génération.
Entre pratique transmise et évolution des sensibilités, la naissance en islam garde une couleur unique, à l’intersection du droit, de la spiritualité et du respect des choix individuels. C’est tout sauf une simple formalité : un moment décisif, porteur d’infinies promesses.